lundi 21 décembre 2009

La triplette de Rabatville

La semaine dernière les filles ont eu une nouvelle petite cousine... ce qui leur fait au total 23 cousins ! Mais dans toute cette bande de cousins, la triplette de Rabatville n'est pas tout-à-fait comme les autres.
Les cousines de là-bas elles sont bizarres parce:

- Elles ont pris l'avion bien avant de savoir marcher.
- Elles n'ont jamais pris le TER ni le TGV.
- Elles trouvent que du saucisson c'est un cadeau génial.
- Elles connaissent 5 Mohammed, 4 Youssef, des Andry, des Fara, des Tatamo, des Khadija et des Mya.
- Elles ne connaissent pas les jeux à la mode et les dernières émissions de télé en France.
- Elles savent que pour voir des nouveaux films il suffit d'aller à la médina.
- Elles trouvent normal de discuter un quart d'heure avec les policiers quand on se fait arrêter. De les appeler "mon frère" ou "chef". De leur donner un petit billet.
- Elles savent ce qu'est une ambassade.
- Elles prononcent "aid moubarak said" avec l'accent du bled.
- Elles sont capables de citer plusieurs espèces de lémuriens.
- Elles sont capables d'imiter le cri du lémurien. Surtout le sifaka.
- Elles savent ce que veut dire endémique.
- Elles savent que des chameaux y en a pas au Maghreb.
- Elles connaissent le nom des continents depuis l'âge de 3 ans.
- Elles pensent que le monde est tout petit.
- Elles ne savent pas très bien d'où elles sont.
- Elles trouvent ça normal de faire plusieurs heures d'avion et de changer de fuseau horaire pour voir ses grands-parents.
- Elles pensent que la France c'est un pays super exotique qui sert à prendre des vacances. D'ailleurs y a pas d'école en France.
- Elles ont vu la neige une fois. Très décevant. C'est pas du tout mousseux et léger. C'est froid et mouillé.
- Elles savent que les saisons c'est compliqué. En tous cas il n'y en a pas 4, ça c'est sûr.
- Elles savent qu'on est maintenant en l'an 1431.
- Elles savent que la vanille c'est noir. Pas blanc.
- Elles ont déjà mangé des mangues, des litchis, des grenadelles, des papayes, des chouchoutes, etc. Fraîches. Du jardin quoi.
- Elles pensent que la vache-qui-rit c'est du fromage.
- Elles sont dégoûtées par le vrai fromage.
- Elles trouvent normal que l'école soit fermée à cause d'un cyclone.
- Elles savent qu'on peut habiter dans des maisons en bois, en terre séchée ou en feuilles de bananier.
- Elles ne sont pas étonnées quand il y a une coupure d'électricité.
- Elles trouvent que la nivaquine c'est pas si mauvais.
- Elles disent négligemment "tiens déjà l'heure de la rupture du jeûne?", les soirs de ramadan, en entendant le coup de canon.
- Elles comprennent ce que dit le muezzin.
- Elles trouvent ça normal d'avoir cours d'arabe tous les matins de 8 à 9.
- Elles savent que le vendredi c'est couscous.
- Elles ont déjà vu comment on égorge un mouton. Et aussi comment on le vide. Et comment on le cuisine.
- Elles trouvent que le zébu c'est meilleur que le boeuf.
- Elles boivent des litres de thé à la menthe au goûter.
- Elles trouvent ça normal d'avoir un pousse-pousse pour jouer dans le jardin, et une mini-tente berbère dans le salon.
- Elles ne sont pas étonnées de voir des gens qui marchent pieds-nus dans la rue. Ou des femmes couvertes par un voile intégral.
- Elles ont une idée très précise sur les prochains pays où elles voudraient habiter.
- Elles se demandent quand est-ce qu'on va changer de pays.
Etc, etc.

Bises aux cousins de l'hexagone !

vendredi 18 décembre 2009

Sanaâ Sa3ida !!

Le monde musulman célèbre aujourd'hui la nouvelle année : on est désormais en 1431.
Mais 1431 après quoi ? Pas après la naissance du Prophète Mohammed à La Mecque (570), ni après sa mort (632). Nous sommes en 1431 après le départ de Mohammed vers Médine, une ville troublée et ruinée par des disputes entre ses habitants. En 622 Mohammed est donc intervenu et, autrefois prédicateur rejeté, il est alors devenu à Médine un homme respecté, un sage, un homme d'Etat, un éducateur. Pour les musulmans le séjour de Médine marque un tournant de la vie de Mohammed. Et quelques année plus tard, le Calife Omar a fait de 622 le point de départ du calendrier musulman.
Pour les petits malins qui sont déjà en train de vérifier si 2010 - 1431 = 622... Et oui le compte n'y est pas. Car le calendrier musulman est exclusivement lunaire : l'année est composée de 12 mois de 29 ou 30 jours. Il y a donc un décalage de 10 ou 11 jours chaque année par rapport au calendrier grégorien.

Aujourd'hui à Rabat, pas d'école, pas de boulot ; il fait beau et chaud... Bonne année !

jeudi 17 décembre 2009

Secoués

Dépêche de la MAP - Maghreb Arabe Presse - ce matin :

"Une secousse de de 5,5 degrés sur l'échelle de Richter resentie de Tanger à Marrakech

Rabat, 17/12/09 - Une secousse tellurique d'une magnitude de 5,5 degrés sur l'échelle ouverte de Richter a été enregistrée, jeudi tôt le matin, annonce l'Institut national de géophysique, relevant du Centre national pour la recherche scientifique et technique (CNRST).
L'épicentre de la secousse, survenue vers 01h38 (GMT), est situé dans l'océan atlantique à 300 km à l'ouest de Tanger, précise-t-on de même source.
Joint au téléphone, le Chef du service de la surveillance et alerte sismique à l'Institut national de géophysique, M.Nacer Jabour, a indiqué à la MAP que cette secousse a été ressentie notamment au niveau des villes de Rabat, Casablanca ,Tanger, Kénitra, Meknès, Fès, Safi et Marrakech."


L'épicentre du tremblement de terre c'est le carré bleu. Ça paraît loin, mais la maison a pourtant bien tremblé cette nuit, ça nous a réveillé... Pas les filles ! Un peu déçues ce matin de ne pas avoir senti la maison qui bouge toute seule...

dimanche 13 décembre 2009

Vaccinés

Ce week-end l'ambassade de France organisait la campagne de vaccination contre la grippe A au Lycée Descartes de Rabat. Passer un samedi après-midi au Lycée Français, voilà une activité plutôt exotique qui enchante les filles.
A 14h nous arrivons à l'entrée de l'établissement, où deux cerbères, genre videurs de boîte de nuit, contrôlent la francitude des candidats à la piqûre. Un Marocain essaye de passer : "Mais je vous jure que je suis Français" - "Et où est votre preuve de nationalité monsieur?". Une autre affirme qu'elle travaille à l'ambassade et qu'elle va appeler un collègue si on la laisse pas rentrer.
La nationalité française c'est le précieux sésame contre la grippe. Car le Maroc a déjà utilisé les 50 000 doses de vaccins commandés : ce sont les pèlerins partant à la Mecque qui en ont bénéficié - obligatoire pour pénétrer en Arabie Saoudite.
Une fois entrés dans le Lycée, nous faisons la queue pour faire contrôler nos fiches médicales. L'organisation est impeccable, la logistique millimétrée (petites vignettes de couleur collées sur les fiches) et le personnel nombreux : une bonne partie de l'ambassade a été réquisitionnée, même le Consul de France qui s'agite le long de la queue. Dans son empressement il percute Lily qui part en vol plané sur le bitume de la cour de récré. "Bah au moins, ça la met dans de bonnes dispositions pour la suite, ha ha ha" - s'exclame-t-il devant Lily en larmes. Humour de consul sûrement.
Ensuite on nous oriente vers la salle 6, transformée en dispensaire de brousse le temps d'un week-end. Derrière un paravent sommaire, entre le tableau noir et les tables d'écoliers, le médecin nous pique tous les 5, à la chaîne et sans ménagement. Elle y met tellement d'enthousiasme que Jeanne saute en l'air de terreur. Le médecin repique aussi sec : encore raté! La troisième tentative sera la bonne... Bilan : trois jolis trous dans l'épaule de Jeanne.
Pendant ce temps le Consul de France s'énerve parce que tout le monde réclame une dose sans adjuvant, sous le prétexte d'allergie, d'asthme ou autre bobologie inopinée. "Non mais qu'est-ce que vous croyez, le vaccin sans adjuvant c'est pas du jus de framboise!" - humour de Consul encore.
Dans le Lycée on rencontre d'autres parents d'élèves, des amis, des voisins. Les enfants jouent dans la cour. Capucine et Jeanne se font des nouveaux copains venus d'autres écoles françaises de Rabat. Rendez-vous dans 10 ans dans la cour de Descartes...

vendredi 11 décembre 2009

Des chiffres et des lettres (latines)


Cette publicité de Kitéa est une petite révolution au Maroc...
Non pas parce que l'ersatz du géant suédois fait des soldes sur ses lits et ses armoires en kit (avec tournevis inutilisable fourni avec!)
Mais parce que le slogan est en lettres latines.
"Hada soldes machi tfelya !" ("c'est les soldes c'est pas des blagues!") : c'est du darija, le dialecte marocain. C'est la langue parlée dans la rue par tous les marocains ; elle est très différente de l'Arabe Classique, qui est la langue du Coran, des journaux et de l'enseignement.
Le Darija est un dialecte strictement oral, avec un vocabulaire assez limité. Pour demander des nouvelles à la voisine, faire ses courses ou commander un thé, tout le monde utilise le Darija, mais pour parler politique ou littérature là on a besoin de l'arabe classique ou du français. Et dans les journaux, y compris les publicités, c'est l'arabe classique ou le français qui est utilisé.
Car, contrairement à l'Arable Classique, le Darija ne s'écrit pas.
D'où la révolution Kitéa!
Plus exactement une double révolution : non seulement Kitéa utilise le darija dans sa pub (et non pas l'arabe classique), mais en plus il l'écrit en lettres latines ! (et non pas en lettres arabes).
En fait Kitéa n'est pas vraiment précurseur. L'entreprise ne fait que surfer sur la vague du darija-écrit : en effet les jeunes Marocains ont pris l'habitude ces derniers mois de communiquer par sms ou sur internet en transcrivant phonétiquement le darija avec des lettres latines.
Évidemment tout cela est un peu désordonné, sans aucune règle d'orthographe. Chacun transcrit comme il l'entend. Et comme certains sons sont carrément intranscriptibles, les Marocains utilisent des chiffres.


Mais à force d'être utilisées par tout le monde sur sms ou internet, ces transcriptions sont en passe de devenir des conventions. Ce qui inquiète les défenseurs de la langue arabe et des lettres arabes.
Mais pas de danger... la calligraphie arabe est magnifique et ne sera jamais remplacée dans les livres par une bizarrerie du genre "machi la3b drari!"

dimanche 6 décembre 2009

Elucubrations du dimanche soir ...

Malika est notre nouvelle miss France ... Elle est en 3ème année de droit : Elle est donc plus diplômée que Jean Sarkozy ... (pourrait elle être présidente de l'EPAD ?)

Dans la rubrique Pepole in Moroco : nous accueillons depuis dimanche soir Moussa Dadis Camara, chef de la junte guinéenne, qui a malheureusement pris un pruneau dans la caboche et est venu se faire opérer du crane à l'hopital militaire de Rabat... Le Maroc signale que ce n'est que pour des raisons Humanitaires qu'elle l'accueille ...
Les militaires marocains signalent qu'il est hors de danger à ce jour : la vrai question va-t-il rentrer en Guinée ?

jeudi 3 décembre 2009

Pipoles in Morocco

Jennifer Aniston et Gwyneth Paltrow ont fêté Thanksgiving au Maroc le week-end dernier. Nico et Carla ne vont pas tarder à débarquer pour fêter Noël. Jacques et Bernadette repartent à peine, après une petite semaine de repos. Djamel, Johnny, Patriick et d'autres viennent prendre le thé 2 fois par mois. Le Prince Felipe nous a rendu visite la semaine dernière, avec madame.
On ne peut plus être tranquille deux minutes.

dimanche 29 novembre 2009

Aïd Mobarak Saïd !!!

Tout le monde nous l'avait déconseillé, on nous avait promis une après-midi terrible d'ennui et d'attente, on nous avait décrit d'immangeables plats d'abats. "Mais les filles vont être traumatisées!" avait prédit une collègue..
Samedi nous étions invités chez Soria, notre nounou, pour fêter l'Aid el Kebir chez elle avec sa famille.
Soria habite avec sa maman et son plus jeune frère dans le quartier le plus populaire de la médina : le Mellah (l'ancien quartier juif). Nous avons rendez-vous avec elle à la porte de la médina. Il est 13h et la plupart des familles ont déjà procédé au sacrifice.
La Fête de l'Aid avait commencé à 10h, lorsque SM Mohammed VI a dit les prières et effectué le rite du sacrifice dans son palais royal de Fès. C'était le signal du départ, plus de 5 millions de moutons vont être égorgés en quelques heures.

En allant à la médina rejoindre Soria, nous constatons que Rabat est vide. Personne dans les rues ... ou presque : la ville grouille de bouchers improvisés, louant leurs services pour accomplir le rite. Ainsi on voit ça et là des hommes en tabliers sanguinolents, bottes aux pieds et hachoir à la main, qui se promènent dans la rue en criant... On se croirait dans un film d'horreur des années 80... "Le Boucher de Rabat 1490" !
Tout Rabat sent le sang, la viande grillée et surtout ... ce qu'en France on appellerait le cochon grillé, mais qui ne serait pas très correct de décrire ainsi dans ces circonstances. Bref, une odeur âcre et une nappe de fumée blanche recouvrent la ville.
Nous retrouvons donc Soria qui nous conduit jusque chez elle, en prenant soin d'éviter les "barbecues" géants qui obstruent les petites ruelles du Mellah. Certaines familles égorgent et cuisent le mouton chez elle, d'autres font appel à ces boucheries improvisées dans la rue.
Nous arrivons dans une maison traditionnelle de la médina : derrière la porte d'entrée un couloir fait un coude pour éviter qu'on ne voit l'intérieur de la ruelle, ensuite on pénètre dans une petite cour carrée sur laquelle donnent les différentes pièces de la maison.
Le frère ainé a déjà sacrifié un premier mouton ce matin. Il y en a 2 autres, mais Zoubida, la maman de Soria, ne veut pas qu'il sacrifie les 2 autres moutons, "car il ne fait pas assez ses prières" - nous explique en douce Soria. Zoubida veut que ce soit un bon musulman qui procède au rite...
Un voisin (et bon musulman donc) arrive bientôt, le jogging couvert de sang... Il ne doit pas en être à son premier sacrifice de la journée... Le mouton - qui attendait sagement dans une pièce à côté - vient, ou plutôt est traîné dans la cour... car il n'a pas l'air franchement emballé par l'hommage à Abraham... Le voisin le couche sur le flanc gauche, la tête en direction de la Mecque ; 2 ou 3 hommes l'aident à tenir la bête.


En quelques secondes, le geste est précis, un aller un retour, il tranche le cou du mouton, qui se débat avec énergie pendant plusieurs minutes. Le sang gicle de son cou... C'en est trop pour Lily et Jeanne qui ont battu en retraite dès le premier coup de couteau. Les gâteaux et la télé (allumée forcément... cf le récit de l'anniversaire de Nour il y a quelques semaines) dans le petit salon c'est plus intéressant ; en revanche Capucine reste : "j'ai un peu peur mais je reste parce que ça m'intéresse de savoir comment on fait. Comme ça je saurai pour plus tard, quand je serai grande".
Lorsque le mouton est complètement vidé de son sang, on l'accroche par les pattes dans la cour et on commence à lui enlever la peau, la couche de gras (qui est accrochée sur un fil à linge pour la sécher) et les abats : foie, coeur, poumons, panse, boyaux, etc. ainsi que les pieds et la tête.

(on a beaucoup aimé les bottes porte-couteaux...)

Certains morceaux sont cuits immédiatement sur un petit barbecue dans la cour. La tradition veut qu'on mange le jour même des brochettes de foie, tandis que la carcasse va rassir quelques jours : on la mangera plus tard. La cour est lavée à grande eau et les apprentis-bouchers de la maison remettent ça avec l'autre mouton. Cette fois Jeanne jette un oeil dans la cour pour voir... mais pas longtemps - "il y a beaucoup de sang hein, beaucoup beaucoup de sang ici..."


Après nous être régalé de brochettes de foie (vraiment délicieuses, avec un mélange de sel et cumin) et de thé à la menthe (environ 5 ou 6 verres pour Lily...), nous rentrons à la maison. Choukrane besef à Soria et sa famille pour cette fête !


PS : Aujourd'hui premier dimanche de l'Avent: on se met en route vers Noël. Lors de la liturgie des enfants pendant la messe : "Alors vous avez bien écouté le prêtre, qu'est-ce qu'il se passe aujourd'hui?" Capucine : bah c'est l'Aid !

vendredi 27 novembre 2009

Sacrifice

Demain c'est l'Aid El Kebir !
L'Aid el Kebir veut dire "la grande fête", de son vrai nom Aid Al Adha ("fête du sacrifice").
Cette fête commémore la soumission d'Ibrahim (ou Abraham) à Dieu, symbolisée par l'épisode où il acceptait d'égorger son fils Ismaël (Isaac pour les Chrétiens) sur l'ordre d'Allah. Au dernier moment Allah envoya un mouton par l'entremise de l'archange Gabriel pour remplacer l'enfant comme offrande sacrificielle.
En souvenir de cette soumission totale d'Ibrahim à Dieu, les familles musulmanes sacrifient un mouton ou un bélier, mais parfois d'autres animaux comme des vaches ou des chèvres, en l'égorgeant, couché sur le flanc gauche et la tête tournée vers La Mecque, après la prière et le sermon de l'Aïd.
Cette fête intervient 70 jours après l'Aid El Fitr (la fête de fin de Ramadan) et elle clôt le Haj, le grand pèlerinage à la Mecque.
Au Maroc c'est, comme chaque année, le Roi qui donnera le signal de départ...
Ensuite un peu plus de 5 millions de moutons mâles seront sacrifiés, sur les 7 millions que compte le pays : autrement dit plus des 3/4 du cheptel ! (pour 30 millions d'habitants).
Quant à l'économie du pays elle profite elle aussi de la grande fête. En effet entre les moutons "légers" (50 kg) à 2000 dh, les moutons moyens (60 kg) à 3000 dh et les poids lourds à plus de 3000 dh, le volume global des transactions lors de l'Aid s'élèverait à 12,5 milliards de dh. Soit presque 2% du PIB.
Selon le responsable de la production animale au ministère de l'Agriculture, les ventes de moutons vont à elles seules générer 7 milliards de dh de chiffre d'affaires.
De plus plein de petits emplois bénéficient eux aussi de l'Aid : les vendeurs de rue délaissent leur marchandise habituelle pour vendre couteaux, brochettes et épices ; le voisin s'improvise apprenti-boucher et sacrifie tous les moutons du quartier ; les jeunes passent de maisons en maisons récupérer les têtes et les peaux pour les revendre, etc.
Aid Moubarak Said !

vendredi 20 novembre 2009

Bientôt l'Aïd !


Les premiers moutons sont exposés dans la médina ... les moutons marocains de l'Aïd sont beaux !

jeudi 5 novembre 2009

On a perdu (le) Nour

Le Week-end dernier Jeanne et Lily étaient invités par Nour, le fils de Sanaa, notre nounou, pour fêter comme il se doit ses 5 ans... L'anniversaire version marocaine est assez surprenant pour notre culture occidentale ...

Nous voilà donc partis - avec une heure de retard - pour la Médina. Premier défi : trouver la maison de Nour... Heureusement que Soria (notre autre nounou) était là pour nous guider : on connait la Médina, ses grandes artères, le marché central et la rue des Consuls... Mais la Médina, la vraie, il y a de quoi se perdre... Après être entré dans la médina par une porte annexe et avoir marché dans une rue commerçante encombrée, nous tournons dans une petite rue et tout au fond nous nous arrêtons devant une porte cochère, un escalier sombre... Au premier étage : une musique assourdissante nous tombe dessus. Nous nous retrouvons donc tous les 4 (Pop's est invitée à un autre anniversaire) dans une pièce de ... 8 m² environ, LE salon marocain typique : tapis, table ronde, et banquettes le long des murs. La télévision et la chaine Hifi trônent en bonne place et hurlent (y a pas d'autres mots) des clips marocains et arabes.
Nous ne sommes pas les premiers, mais malgré notre bonne heure de retard, nous sommes loin d'être les derniers. C'est comme ça que ça se passe ici : une heure est toujours approximative... Compter une à deux heures de retard pour une soirée, une bonne demi-heure pour un rendez vous, si vous voulez arriver dans les temps.
Accueillis par Sanaa, la maman de Nour, en grande robe marocaine, cintrée, maquillée, et son mari, elle nous indique une place au fond de la pièce, sur la banquette... Ha... Jeanne et Lily coincées sur une banquette c'est pas gagné...
La famille arrive et défile, la grand mère, la grand tante, les tantes, les soeurs... pas beaucoup d'hommes... 3 pour être exact : le mari de Sanaa, son frère, et moi.
Mais où est Nour ?
Le thé arrive ... les ch'békia ... Lily est dans son élément et elle se met à danser au milieu du salon, au rythme des clips marocains ou égyptiens, et taper des mains comme les autres, au milieu des youyous, des chants et des versets du Coran repris en coeur pour l'occasion par l'assemblée...
Une heure plus tard, nous sommes toujours là, coincés au fond du salon, avec toute la famille de Sanaa assise en brochette sur les banquettes... Personne ne se parle vraiment ; d'ailleurs il faudrait pouvoir crier plus fort que la télé... personne n'a semble-t-il le courage de tenter. Donc on se regarde et on se sourit d'une banquette à l'autre ; on se laisse parfois capter par un clip à la télé ; on mange quelques gateaux quand Sanaa passe avec un nouveau plateau. Lily fait rire les vieilles tantes... faut dire que recevoir une petite famille françaouia c'est pas courant...
Toute le monde se tient tranquille sur sa banquette, y compris les rares - très rares - enfants présents à cet anniversaire... Mais forcément, au bout d'une heure et demi, un ou deux commencent à se chamailler et à jouer au milieu des invités. Immédiatement ils se font attraper par la grand mère. Là une parenthèse s'impose : je me dois de vous décrire un peu la grand mère. C'est une vieille dame très ratatinée, mais très alerte. Son visage est comme tout chiffonné, avec deux petits yeux noirs et pétillants qui essayent de se faire un peu de place au milieu de toutes ces rides.... On dirait une carte postale, avec son voile coloré et ses tatouages traditionnels sur le visage. Elle a l'air gentille et pleine de vie ... Mais quand elle se fâche contre les enfants, imaginez-vous une sorcière deux fois plus grande que vous, qui vous attrape par le col de la chemise et vous dit des choses pas vraiment gentilles avec un air pas content du tout. Drame...
Mais ou est Nour ?
Soudain Sanaa éteint la télé... Haaa... quel bonheur ce silence... Mais le répit est de courte durée, car un groupe de musiciens arrive dans le petit salon : ils jouent d'une sorte de trompette traditionnelle assez stridente, du tambourin et chantent des airs marocains. Les banquettes se vident d'un seul coup, toute la famille est debout, danse au milieu du salon, tape dans les mains ; c'est très joyeux. Au bout d'un quart d'heure le groupe repart aussi soudainement qu'il est arrivé... et on remet la télé bien sûr !
Toujours pas d'anniversaire - du moins pas au sens où on l'entend en France. Pas d'animation pour les enfants, qui d'ailleurs ne sont pas franchement le centre de la fête. Sanaa et son mari sont invisibles et passent de temps en temps pour vérifier que leurs invités, et surtout nous, ne manquons de rien. Gâteaux, thé (excellent d'ailleurs)...
Mais où est Nour ?
Nour est bien là en face de nous, assis sur sa banquette ; il trouve le temps un peu long et les dessins animés qui défilent sur la télé, entrecoupés de séries américaines et de clips arabes, ne suffisent pas à l'intéresser.
Soria est là pour nous expliquer un peu ... heureusement.
Ainsi se passent les anniversaires au Maroc : il serait très impoli de la part des hôtes de s'assoir auprès de leurs invités pour animer la conversation. Leur rôle est de s'occuper de la cuisine et de faire tout pour que les invités n'aient pas à lever le petit doigt de l'après midi. Une fête réussie est une fête où toutes les banquettes sont remplies...
L'anniversaire, comme la plus part des fêtes marocaines est une fête familiale, où nous invitons donc la famille et les amis proches ... Mais pas nécessairement les enfants. Cette fête durera jusqu'à 22h au moins (nous sommes là depuis 15h !! il est 17h30 ...) et le gâteau n'arrivera qu'en fin d'après midi. En attendant on danse un peu, on boit du thé et on mange des gâteaux. Assis sur sa banquette.
Alors faisons comme tout le monde... nous mangeons, buvons et dansons !
Mais il faut quand même que nous rentrions, et avant 18h nous quittons nos hôtes, que nous remercions plus que chaleureusement ... Ils sont un peu étonnés de nous voir partir si tôt, mais dans l'affaire nous avons décroché une invitation pour l'Aïd ! et ça aussi on y sera, c'est promis !

mardi 20 octobre 2009

Windows marocain... Remake

En 2007, habitant alors à Tana, j’avais écrit ce texte :

« Que serait aujourd'hui l'informatique si Bill Gates avait été malagasy ? Avec quoi serions-nous obligés de travailler si Windows avait été conçu sur l'île rouge ? C'est de la fiction heureusement...
Si Windows était malagasy...
L'horloge indiquerait l'heure à une demi-heure près.
Il faudrait lui faire un kabary (un discours) avant qu'il accepte de démarrer.

Certaines fonctions seraient inaccessibles et une fenêtre s'ouvrirait disant : "Impossible d'effectuer, l'ancêtre dit que c'est fady" (interdit).
Une autre fenêtre s'ouvrirait : "Pour continuer, vous devez sacrifier trois logiciels avant le coucher du soleil".
A chaque question vous auriez le choix entre "OK" ou "oui oui".
Internet ne fonctionnerait qu'entre membres de la même famille, voire d'une même ethnie.
Il se mettrait automatiquement en veille à la tombée de la nuit.
Il tomberait en panne au bout d'un an et votre vendeur vous dirait de contacter votre bailleur de fonds habituel.
Alors ? Le tout-puissant windows américain n'est pas si mal finalement ?? »

Et en 2009, forcément, ça donne ça :

Que serait aujourd'hui l'informatique si Bill Gates avait été Marocain ? Avec quoi serions-nous obligés de travailler si Windows avait été conçu au pays des cornes de gazelles ? C'est de la fiction heureusement...
Si Windows était marocain…
L'horloge indiquerait l'heure à une demi-heure près.
Il faudrait lui demander des nouvelles de sa femme, ses enfants, ses parents, ses frères et sœurs, avant qu’il accepte de démarrer.
Word ne pourrait fonctionner qu’en latin ou éventuellement en vieux français.
A chaque question vous auriez le choix entre « Ok inch Allah » ou « oui inch Allah ».
Toutes les 3 heures il se mettrait en veille en entendant le muezzin du coin et se rallumerait 2 minutes plus tard.
Chaque année, pendant un mois, il ne fonctionnerait que du coucher au lever du soleil.
L’ordinateur disparaitrait mystérieusement si vous tapiez les mots « Roi », « Sahara » ou « Islam ».
Il tomberait en panne au bout d’un mois, mais vous pourriez le réparer sans problème à la médina.
Il tomberait encore en panne quelques mois plus tard et un cousin paternel du beau-frère de l’oncle maternel du gars de la médina vous trouverait une super combine pas chère pour le remplacer.

Alors ? On ne remerciera jamais assez Bill Gates hein ?

lundi 19 octobre 2009

Sortie champêtre

Les Rbatis adorent pique-niquer en forêt. Le dos appuyé contre la carosserie de leur voiture bien-aimée, les portières-avant ouvertes pour entendre la radio hurlant des vieux tubes égyptiens, des sandwiches de vache-qui-rit et une bière à la main.
Malheureusement la sensibilisation à l'environnement n'en est qu'à ses tout débuts au Maroc et les forêts sont de véritables dépotoirs. Car ça ne dérange pas du tout les Marocains de laisser sur place leurs bouteilles, leurs emballages en plastique et en carton, ou toutes sortes de papiers.

Impossible donc de pique-niquer dans les forêts - ou du moins en forêt à proximité de la route, car un Marocain ne s'éloigne jamais de sa voiture. Le truc c'est de s'enfoncer dans la forêt : au bout de quelques centaines de mètres les ordures deviennent clairsemées, puis disparaissent. Et là on se retrouve dans une forêt d'arbres en bois et en feuilles, c'est dingue !

Encore plus dingue : ce week-end, dans une forêt de chênes-lièges, on est tombé nez-à-nez (enfin, façon de parler...) avec 2 tortues ! oui oui, des tortues des bois ! "Chat, chat !" - a crié Lily, pour qui tout ce qui marche à 4 pattes est "chat".

Quant à Capucine et Jeanne, elles ont découvert une carcasse de vache - bien entendu "dévorée par un loup" - et ont passé une heure à observer les os. Très bucolique hein les sorties en forêts à cet âge-là !

Conclusion : on a ramené une tortue à la maison, mais pas les os. Pourtant un crâne de vache ça ferait joli sur la cheminée maman...

lundi 12 octobre 2009

Le chameau et le pognon

Depuis deux semaines on a lancé à la paroisse Saint Pie X de Rabat une liturgie de la parole pour les enfants. Les plus petits - 4 à 7 ans - quittent la messe au moment de la première lecture et reviennent à la fin du crédo. Ils vont dans une salle, où, à tour de rôle, 2 parents expliquent l'évangile du jour, leur font faire des dessins ou de la poterie et chantent.
Aujourd'hui évangile selon Saint Marc : "Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d'une aiguille qu'à un riche d'entrer dans le Royaume de Dieu".
Un petit garçon nous explique : "Par exemple si tu as des valises pleine de pognon tu pourras pas entrer !"
Les enfants comprennent vite...
Enfin, petit bémol de certains : "mais quand même il faut garder un peu d'argent pour manger, non ?"

vendredi 9 octobre 2009

Mitterrand bis repetita

Exercice de communication puant et insupportable de Mitterrand hier soir sur TF1.
Son agent artistique a bien travaillé, tout était là pour émouvoir la ménagère : la tête penchée de côté, le ton suave, les mains nouées, la petite pensée pour sa pov' mère et ses enfants... Beurk. Tant de pathos sur des sujets aussi graves c'est écoeurant.
Car malgré tout son talent d'acteur de cinéma hollywodien, Mitterrand a aggravé son cas : en fin d'interview il condamne avec force le tourisme sexuel (qui "est une honte", dit-il), alors que deux minutes plus tôt il avait reconnu qu'il avait eu des relations sexuelles tarifées avec des garçons en Thaïlande. Mais attention - "les yeux dans les yeux Laurence Ferrari" - uniquement avec des garçons consentants !
Alors d'abord, "relations sexuelles tarifées" ça veut exactement dire "tourisme sexuel". Donc comment peut-il condamner un acte qu'il a pratiqué ? Comment peut-il dire qu'il n'a pas commis de crime, ni même de faute, si le tourisme sexuel est une honte ??
D'autre part, comment au 21è siècle, peut-on encore parler de "relations consenties" pour des actes de prostitution ? Surtout dans des pays pauvres, où les prostitués sont tout sauf consentants. L'argent des consommateurs en fait des esclaves, l'abus sexuel découle de l'abus de pouvoir. Et c'est un crime puni par le Code pénal.
Mitterrand ferait mieux d'aller faire carrière sous les projeteurs des caméras...

Karaté

Chi - Ni - San - Shi - Go - Ro - Shi - Chi - Ku - Ju ! Première leçon de japonais hier soir...
Ou plus exactement premier cours de karaté.
Et entre le judo et le karaté, je commence à avoir un petit niveau de japonais mine de rien...
Bon évidemment c'est pas toujours facile de placer "coup de pied circulaire" ou "tranchant de la main" dans une conversation. Mais face à un néophyte ça peut faire de l'effet... surtout avec un cri à la Bruce Lee pour ponctuer les phrases.
D'ailleurs les Marocains ceinture noire du cours ils adorent ça crier. Le karaté c'est pas pour rigoler, c'est du sérieux et ils se donnent à fond. A chaque kata, on dirait qu'ils sont en train d'affronter une armée de rebelles du Sahara occidental...



Si si, c'est exactement comme ça que je fais...

mercredi 7 octobre 2009

Mauvaise vie.

«J’ai pris le pli de payer pour des garçons [...] Évidemment, j’ai lu ce qu’on a pu écrire sur le commerce des garçons d’ici .[...] Je sais ce qu’il y a de vrai. La misère ambiante, le maquereautage généralisé, les montagnes de dollars que ça rapporte quand les gosses n’en retirent que des miettes, la drogue qui fait des ravages, les maladies, les détails sordides de tout ce trafic.
Mais cela ne m’empêche pas d’y retourner. Tous ces rituels de foire aux éphèbes, de marché aux esclaves m’excitent énormément […] On ne pourrait juger qu’un tel spectacle abominable d’un point de vue moral, mais il me plaît au-delà du raisonnable […] La profusion de jeunes garçons très attrayants et immédiatement disponibles me met dans un état de désir que je n’ai plus besoin de réfréner ou d’occulter. »


Frédéric Mitterrand - ministre français de la culture.
in "La mauvaise vie", Édition Robert Laffont.


Et dire que mon ONG dépense des millions d'euros pour lutter contre le tourisme sexuel. Pour convaincre les familles de ne pas vendre leurs enfants. Pour reconstruire des gamins détruits par des actes qu'ils ne comprennent pas. Pour les aider à ne pas avoir honte de leur corps. Pour leur redonner confiance en eux.

Le recours à la prostitution enfantine est passible d'une peine de 3 à 7 ans de prison. Article 225-12 du Code Pénal. C'est pas cher payé quand on a bousillé un enfant.

Nous si on le chope sur la Place Jemaa El Fnaa à Marrakech, il va passer un sale quart d'heure le ministre...

vendredi 2 octobre 2009

De l'angle et de la situation ...

Discussion passionnante hier avec Lala à Conakry (merci Skype !) en Guinée. Lala est coordinatrice dans un programme de formation et d'accompagnement des journalistes locaux, financé par une ONG américaine.
Les derniers évènements à Conakry ont montré la fragilité du pouvoir en place. Les réactions de la France, de l'Afrique et du monde ont été immédiates... Mais qu'en est il vraiment ? La réalité semble toute autre. Je ne veux pas faire ici un résumé de la situation... Un aperçu peut-être, très rapide : un capitaine qui tient un pouvoir illégitime, un gouvernement de discorde ... une armée divisée dont on ne sait plus qui dirige qui ... Et des exactions qui ne se sont pas limitées à la tuerie du 29 septembre et qui continuent encore et toujours.
Ce qui est intéressant dans tout ça, c'est la vision différente que l'on peut avoir, soit à travers les médias qui font avec ce qu'ils ont, soit à travers les amis et les connaissances sur place qui donnent leur vision des choses. L'un ne peut aller sans l'autre bien entendu. Si la vision de l'un (les médias) peut parfois être tronquée par des manipulations politiques et des intérêts extérieurs, celle de l'autre (les témoignages sur place) manque parfois de recul pour en avoir les idées claires - ce qui est normal et humain quand on vit au coeur d'une actualité troublée, voire violente.
Nous vivons un peu le même scénario avec les troubles politiques malgaches, au détail près que nous connaissons, parfois personnellement, les protagonistes de l'histoire. Les infos et analyses des médias et de nos contacts sur place étaient parfois, au plus fort de la crise, aux antipodes les unes des autres.
Je profite de l'occasion pour vous conseiller un reportage de France 24 sur la situation des fermiers blancs au Zimbabwe, dont on ne parle plus beaucoup aujourd'hui. Un reportage plein de nuances, et dont la conclusion mesurée est intéressante et tellement rare.

Triste record

Devise du conducteur marocain :
"A un carrefour, de nuit, tu fonces quand le feu est rouge. Et si le feu est vert, tu ralentis pour vérifier qu'une voiture n'est pas en train de brûler le feu d'en face"

Le Maroc est l'un des pays les plus meurtriers en termes d'accidents de la route. Plus de 4000 morts en 2008, 13 000 blessés graves. 70 000 accidents par an. En proportion, la route tue 13 fois plus au Maroc qu'en France.
Et ce n'est pas très étonnant quand on voit conduire les Marocains. Même les conducteurs de taxi-brousse malgaches sont de courtois et prudents chauffeurs à côté... c'est dire !


Les Marocains se conduisent sur les routes comme s'ils avaient tous les meilleures cartes du Mille Bornes, genre Feu vert + prioritaire + as du volant + fin de limite de vitesse etc etc ! Du coup forcément ça bugge...
Et le plus drôle c'est que si un policier ou un gendarme (y en a tous les 200 m ici, surtout dans la capitale) s'avise de les arrêter, ils n'hésitent à discuter, le contredire, voire à l'engueuler... "Moi j'ai brûlé le feu rouge ??!! mais il est mal placé votre feu rouge !"

jeudi 1 octobre 2009

Café bouillu...

Ce matin je me rends à la Préfecture à 8h pour le renouvellement de mon visa. Le Service des Visas étant encore fermé, je m’installe à la terrasse d’une gargote en face de la Préfecture et commande un expresso. « Tasse ou verre ? » - Au Maroc on choisit son contenant. Les Marocains ont plutôt l’habitude de prendre leur café dans des petits verres transparents ; j’opte pour la tasse traditionnelle, genre brasserie parisienne.
La serveuse m’apporte un café littéralement bouillant. En attendant qu'il refroidisse un peu, je regarde les marchands de fleurs en face du café, je bois mon verre d'eau, j'écoute la radio qui explique que le système bancaire marocain ne craint pas la crise, je me demande à quelle sauce je vais être mangée par le cerbère du Service des Visas. Bref les minutes passent, mon café refroidit enfin. Et soudain la serveuse s'approche de moi, en se tordant les mains, le visage crispé. Elle se confond en excuses pour le "mauvais café" auquel je n'ai toujours pas touché. Elle me l'enlève et m'en ramène un autre illico malgré mes protestations. La gentillesse marocaine m'étonnera toujours. Haaa si les serveurs parisiens pouvaient venir en stage ici...

Mais moi je suis revenue à la case départ : café bouillant. Cette fois je l'ai bu fissa...

mercredi 30 septembre 2009

Pastis à la menthe

La semaine prochaine toutes les stars du feuilleton "Plus belle la vie" viennent tourner chez nous pendant 15 jours ! On n'est pas des petits chanceux hein ?!
Enfin chez nous... A Agadir et Ourzazate plus exactement. C'est pas la porte à côté, mais on va se débrouiller pour se glisser dans le champs...



Il paraît que les producteurs ont hésité entre la Belgique et le Maroc pour délocaliser le tournage...

mardi 29 septembre 2009

Questions-réponses

Nous avons reçu un commentaire de JIM hier soir sur nos derniers textes. Je le publie ici, avec la réponse juste après ! J'en fais un nouveau post uniquement parce que la fenêtre de commentaires ne me permet pas de poster des textes aussi longs...

Merci à Jim pour le débat!
Voici son commentaire :

"Salut les amis,
Moi aussi je suis content de renouer contact avec vous.
Cela dit en tant qu ami je tiens à vous exprimer une certaine incompréhension par rapport au contenu des 2 derniers messages (ecole + jeûne), j avoue que je n ai pas cherché à regarder tous les autres.
L'ecole : vous etes dans un pays etranger et faire connaitre aux enfants francais la culture du pays via la langue marocaine (meme si elle n est pas parlée aujourd'hui) participe de l'integration de vos enfants dans le pays et du partage de references communes avec les autres enfants. Si vous aviez été a NY et vos enfants a l'ecole francaise auriez vous ete choqués de la meme manière que vos enfants parlent quasiment tte la journée en anglais ? La chute du message me fait penser à une sorte de xenophobie a l'envers sur le theme : s il ne sont pas bien à l ecole francaise les marocains, qu ils retournent chez eux, on sera mieux entre nous. Ou est le 'vivre ensemble' dans ce message ? Mais bon j ai sans doute mal interpreté.
Le jeune : Le ton est plus qu ironique, j irai jusqu a dire donneur de lecon. Les contradictions que vivent les cultures et les peuples sont un lieu commun et universels. Et pour avoir vecu au Maroc 1 an et demi, je n ai pas eu l impression que les musulmans du Maroc transpirent plus la contradiction que, par exemple, des catholiques pratiquants qui n'auraient pas un regard bienveillant sur leur prochain. La pratique d une religion regarde chacun d'entre nous, quelque soit la religion et quelque soit le mode et la profondeur de la pratique.
Je réagis parce que je ne voudrais pas que vous arriviez à 40 ans comme ces vieux expats en fin de vie qui trainent dans des pays en voie de developpement et qui ne supportent plus les locaux qui les entourent.
En esperant vous lire bientot dans des messages plus mesurés.
Jean marie"
Envoyé par Jim à Sur l'Ile Rouge le 28 septembre 2009 23:40


Et voici la réponse :

Jean-Marie,
Je te remercie d'avoir lu et réagi à notre blog, néanmoins je reste perplexe, et même triste de ton commentaire. Peut-être as-tu lu trop rapidement, et es-tu passé à côté de mes textes.

Concernant l'arabe : l'arabe classique enseigné à l'école française en CP est une langue écrite maîtrisée par les personnes lettrées ; c'est pourquoi nous sommes très déçus - comme tous les parents français ou d'autres nationalités étrangères - que les enfants n'apprennent pas le darija (arabe dialectal parlé dans la rue par tout le monde). Si on avait été à NY on aurait été ravi que nos enfants apprennent l'anglais. De la même façon, on souhaiterait que nos enfants apprennent le darija à l'école. Apprendre l'arabe classique est très intéressant pour comprendre la culture moyen-orientale, mais nos enfants ont 6, 4 et 1 an ! Pour l'instant on voudrait juste qu'elles discutent en darija avec leurs copains dans la cour ou avec la nounou à la maison ! Elles commencent d'ailleurs à se débrouiller très bien et adorent apprendre des nouveaux mots avec la nounou - peut-être est-ce parce que nous avons su leur transmettre notre enthousiasme pour le pays, la culture et la langue marocaine. Quant à moi je prends des cours de darija depuis 7 mois (je ne crois pas que tu aies fait cet effort lors de ton séjour au Maroc?) et j'essaye de progresser chaque jour avec mes collègues de travail... hum hum... c'est pas gagné... surtout pour les sonorités guturales...

Concernant le jeûne : le ramadan est une contradiction flagrante dans la pratique religieuse du Maroc, c'est une opinion que partagent beaucoup de Marocains qui souhaiteraient justement pouvoir ne pas jeûner, ou jeûner seulement une partie du ramadan, selon leurs convictions personnelles. Comme tu le dis, la pratique religieuse regarde chacun d'entre nous : c'est exactement l'objet de mon texte ! Je m'étonnais en effet de la rigidité et de la pression de l'Etat (peine de prison pour une rupture de jeûne par exemple) pendant le ramadan ; ça ne correspond pas à ce que vit la population toute l'année, qui se sent de fait contrainte et sous surveillance pendant le jeûne.
Tu as peut-être confondu "Maroc" et "Marocains" dans ma réflexion ? Je ne juge pas les Marocains, j'ai au contraire essayé de donner de la visibilité aux 15 courageux (car il en a fallu du courage pour braver l'interdit, en sachant que ça se finirait par 6 mois de prison... c'est un acte héroïque à mon avis) qui ont mangé leur sandwich en pleine journée. J'ai aussi essayé de montrer la rigidité de l'Etat, de la loi, de la police, qui pousse la population à se surveiller 1 mois sur 12.

Au delà de ces deux textes, je tiens à te dire à quel point j'ai été blessée par tes propos. Nous entamons notre 7è année à l'étranger, j'ai connu Madagascar comme très peu d'expatriés peuvent connaître ce pays, j'ai fait des reportages partout dans le pays, et notamment auprès des plus pauvres, j'ai essayé d'appréhender la culture et les complexités de ce pays en profondeur. Aujourd'hui je m'implique pour le Maroc en travaillant pour une association marocaine, aux côtés des Marocains, en faveur des enfants exploités et abusés.
Nous sommes arrivés à Madagascar, puis au Maroc sans rien connaître de ces 2 pays bien différents de la France. Mais nous sommes très curieux ! Et nous nous investissons chaque jour pour essayer de découvrir, de comprendre, dans le but de nous intégrer dans notre pays d'accueil. Nous avons une démarche d'intégration bien différente de beaucoup d'expatriés et je suis blessée que tu nous compares à des "vieux expats qui ne supportent plus les locaux", je suis encore plus choquée que tu te permettes de nous taxer de xénophobie.
Tu as certes vécu 16 mois au Maroc ; nous, nous avons choisi de vivre à l'étranger sans date de retour : je ne crois pas que nous ayons des leçons à recevoir sur les difficultés de l'interculturalité. Nous ne "traînons pas dans des pays en voie de développement". Au contraire, nous vivons au quotidien le "vivre ensemble" depuis plus de 6 ans, à Madagascar et au Maroc ; c'est très riche, c'est passionnant et c'est parfois difficile car il faut de longues années pour comprendre un peuple et une culture. On tatonne dans notre découverte, on s'émerveille, on s'interroge, on s'étonne, et surtout on essaye de partager tout ça avec nos enfants, mais aussi avec nos proches. Et nous nous exprimons à vif sur notre blog.

Enfin, à propos du blog, tu n'as sans doute pas compris qu'il s'agit d'un blog coups de coeur / coups de gueule, qui ne traduit pas de façon exhaustive ce que nous vivons. Nous écrivons simplement des impressions et des anecdotes ; pour les nouvelles plus complètes nous envoyons des mails à nos proches.
Ce blog a démarré comme une "radio-pirate" : je pouvais y écrire tout ce que je n'avais pas le droit de dire sur les ondes, au moment où les tensions politiques étaient grandes à Madagascar et me condamnaient à l'autocensure dans mes papiers à l'antenne. J'ai conservé le ton impertinent et anecdotique, mais l'ironie n'empêche pas d'aimer je crois... Vu nos difficultés depuis notre arrivée, nous serions partis depuis longtemps si nous n'aimions pas le Maroc.
Ce blog est quelquefois un exhutoire et contient beaucoup d'ironie ; je crois que quand on est expatrié depuis si longtemps c'est un espace d'expression indispensable. Nous avons adoré Madagascar, nous adorons le Maroc et nous refusons, nous, de vivre dans une bulle comme beaucoup d'expatriés. Nous accueillons les proches qui nous rendent visite avec enthousiasme ; nous prenons du temps pour leur faire découvrir au mieux le pays (même si on manque encore de bonnes petites adresses secrètes spéciales visiteurs ! mais ça vient...) ; mais nous avons aussi besoin de sourire, taquiner, critiquer, pour réfléchir à voix haute sur notre pays d'accueil. Nous sommes au Maroc depuis plus d'un an, nous découvrons chaque jour un peu plus le Maroc : c'est donc un blog qui vit et qui se périme !

Jean-Marie j'espère que tu prendras la peine de prendre de nos nouvelles pour savoir ce qu'on vit, et de lire ce blog (près de 90 messages depuis 3 ans...) pour sourire un peu... Ne nous juge pas si vite... Bonne lecture !


vendredi 25 septembre 2009

Le Coran à l'école de Jules Ferry

Réunion de parents d'élèves pour le CP hier soir.
Les 3/4 de la réunion ont été monopolisés par Mohammed le prof d'arabe et les questions des parents marocains (90% des élèves de la classe sont marocains, 2 sont Français et 1 élève vient d'Afrique de l'ouest).
Après avoir demandé (sans rire) s'il devait faire son intervention en français ou en arabe, Mohammed a pris le livre et les cahiers d'exercices et a détaillé toutes les leçons, les objectifs de l'année, les apprentissages en cours, les thèmes étudiés, etc. On a donc pu découvrir qu'en CP, à l'école FRANÇAISE, on fait 3 heures d'arabe par semaine (5 heures à partir du CE1), avec règles de grammaire, conjugaisons et lignes d'écriture.
Pire : on a découvert qu'il s'agissait d'un enseignement d'arabe classique. Autrement dit l'arabe littéraire, l'arabe du Coran, l'arabe du VIIè siècle. L'arabe classique est une langue strictement écrite, qui ne se parle pas et qui n'a pas bougé depuis 14 siècles. D'ailleurs personne - au Maroc ou dans d'autres pays - ne parle cette langue comme langue maternelle. Les personnes lettrées la maîtrisent à peu près ; le Marocain moyen en maîtrise une forme simplifiée : l'arabe des journaux et des discours officiels.
Cet arabe classique est très différent de l'arabe dialectal qui lui est la langue d'expression orale, l'arabe de tous les jours, l'arabe de la rue, bref la langue utile à apprendre.
Mais non... A l'école française on apprend l'arabe du Coran ! On en apprend les subtilités grammaticales, on apprend à l'écrire, on apprend des poésies médiévales.
Tiens je me demande même s'ils n'apprendraient pas le Coran en douce.


Quoi qu'il en soit, c'est maintenant une certitude : l'école française du Maroc est définitivement faite pour les élèves marocains - on l'avait d'ailleurs déjà remarqué pendant le ramadan où les horaires de classe avaient changé pour être adaptés au "rythme ramadan".
Et hier soir à la réunion, les parents d'élèves, la voix angoissée : "Mais vont-ils avoir un niveau d'arabe classique aussi bon que dans une école privée marocaine ?". "Pourquoi n'y a-t-il que trois heures par semaine ?". Et "que peut-on faire pour les faire travailler en plus ?"
Ben... mettre ses enfants dans une école marocaine par exemple, pas dans une école française !

jeudi 24 septembre 2009

Les dé-jeûneurs publics

Le dimanche 13 septembre, en plein ramadan, environ 70 Marocains se rassemblent à Mohammedia, à 80 km au sud de Rabat. Il est 13h et ils ont décidé de casser la croûte en public et en plein jour.
100 policiers sont là aussi et finalement seulement 15 Marocains osent manger leur sandwich...
"100 policiers contre 15 sandwichs !" - titre le lendemain le journal espagnol El Mundo.
Ces Marocains voulaient protester contre l'article 222 du Code Pénal qui punit d'une peine de 1 à 6 mois de prison ferme assortie d'amendes, tout Marocain qui n'observe pas le jeûne en public.
La loi accorde une dérogation aux personnes âgées, aux malades, aux femmes enceintes ou qui allaitent, mais ils doivent tout de même se cacher pour manger.
"C'est une ingérence dans la vie privée", "une tradition antidémocratique" - affirme les membres du Mouvement Alternatif pour les Libertés Individuelles, à l'origine du pique-nique public.
"Ce sont des inconscients qui ont voulu pêcher en eaux trouble" d'après le gouvernement. "C'est un acte odieux qui défie les enseignements de Dieu et du prophète" selon le conseil des Oulémas. Rien que ça.
En tous cas 15 insoumis sur 30 millions d'habitants, ça fait pas beaucoup. Et c'est quand même bizarre. Voire même hypocrite.
Toute l'année on peut voir les Marocains se promener tranquillement le vendredi midi à l'heure de la grande prière, tandis que les mosquées restent vides. On peut voir des hommes sirotant leur thé à la terrasse des cafés pendant que le muezzin s'égosille. On peut voir des caddies remplis de bouteilles d'alcool fort ou de bière à la caisse des supermarchés le week-end. On peut voir des jeunes en train de boire et fumer en discothèques jusqu'au petit matin.
Par contre pas question de ne pas faire le ramadan. Tout le monde s'y soumet et surveille son voisin... Même les piliers de comptoirs. Même ceux qui ne prient jamais.
Le Maroc, un pays musulman 1 mois sur 12 ?

mercredi 23 septembre 2009

Le retour !!!!

Salam Aleikoum ! Aid Moubarak ! Labès ??!
C'est la fin du ramadan et l'heure des grandes résolutions... A la demande générale nous reprenons donc ce blog - bien qu'il porte toujours aussi mal son nom!
En effet nous sommes toujours au pays des dromadaires (mais ils sont où?), des cornes de gazelle et du thé à la menthe (ça oui on a testé).
Pour fêter la fin du ramadan (ho que oui ça se fête!) et notre héroïsme (si si je vous assure), nous avions prévu un petit week-end au bord de la Méditerranée dans la région de Tétouan. Notre propriétaire insistait depuis des mois pour nous prêter son palais là-bas ; avec l'Aid et le week-end de 4 jours c'était donc l'occasion d'en profiter.
Après 3 bonnes heures de route, nous arrivons dans un village très chic pas loin de Ceuta. Le Palais est en face de l'entrée du Club Med selon le plan de la proprio, c'est tout simple. Une heure plus tard et 3 km plus loin nous finissons par trouver la rue du Palais (en face du Club Med à 3 km près donc... ben voyons... elle a pas fait carto la proprio).
Dans la ruelle s'alignent les villas somptueuses à colonnades en stuc, terrasses monumentales et piscines bleues turquoise (bien entendu visibles de l'extérieur... sinon à quoi ça sert d'avoir une piscine ??).
Toute la ruelle ? non. Au milieu, une maison abandonnée aux vitres cassées dénote avec le reste de ce décor à paillettes. On fait semblant de ne pas la voir, on cherche notre Palais... Non... non c'est pas possible... Il y a forcément une erreur...
Héé si, la maison hantée tout droit sortie d'un film d'horreur est bien la "nôtre". Mais comme c'est notre jour de chance, impossible de rentrer dedans : la propriétaire (quelle farceuse hein?) s'est trompée de clé. On escalade la terrasse, on force un volet et on parvient à entrer par la fenêtre. A l'intérieur pas d'eau, pas de drap ni de couverture, des champignons plein de frigo, pas de vaisselle... mais des salons marocains très équipés par contre.
Retour illico à Rabat, après une très chouette visite de Chefchaouen (la capitale du shit marocain), sa medina toute bleue, ses ruelles en pente, ses remparts, ses altermondialistes en dreadlocks et ses revendeurs de shit pas franchement discrets ("j'ai de la bonne, t'en veux ?"... bien sûr mon frère je leur en mets dans le biberon tous les matins!).
Moralité : ne pas faire confiance à un Marocain qui prétend avoir un palais... Ou alors attendre la fin du ramadan qu'il ait retrouvé ses esprits.
Et conclusion : un week-end de l'Aid à Rabat c'est très sympa aussi!